N'en jetons presque plus ! Trions, reprenons, détournons.
L'essentiel est presque bien dit et redit, en long, en large...
Reprenons serré, de travers, à travers.
Par les moyens d'avenir du présent. Pour le présent de l'avenir.
(OTTO)KARL

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2013-11-14

en post(e) campagne

C’est dans la campagne sans lune, noir total, que j’ai vu pour la première fois le lapin fluo, vert intense dans son champ abandonné, menant sa vie, indifférent à l’idée de son étrangeté, dans un halo brûlant, comme on ferme les yeux sur le souvenir de quelqu’un, signal dans la nuit noire, petit point.

Sage comme une image.

Plus mangeable, ce lapin-là, le contraire du boeuf, ex-vache, viande sur pied dès sa naissance, placard de boucherie au ralenti dans les prés, le front bouclé trempé, les yeux noirs exorbités de peur quand on les fait grimper dans le camion.

Ajouter ici une histoire vraie à propos de gens qui aiment leur vache jusqu’à leur tisser des couvertures sur mesure.

C’est loin.

Un philosophe disait qu’il fallait faire exploser le passé dans le présent, il avait raison.

Construisons.

C’est flou.

Un coup de blanc mais pas trop, pas trop de peinture, attention, ou alors ne pas poncer ni enduire avant, pour garder visible le relief de ce qui s’est passé.

Il faudrait faire une étude.

Se documenter, comprendre, rattraper le temps perdu, consulter les bons traités techniques, trouver les bonnes sources, recouper, faire parler les témoins, bien recopier.

Le lapin fluo, c’est tout le contraire de vos vaches classiques.

Réalisé avec amour par un artiste de labo dans son atelier-hôpital, prototype vivant, oreilles clonées et douces, cible idéale dans campagne transparente, gibier 4D pour nouveau chasseur.

Boum.

Planqué dans les fossés aussi visible qu’un fugitif à l’infrarouge.

Chasseur écologique nouvelle génération.

Après chasseur, il fera artiste dans la post-campagne.

C’est dans très bientôt déjà.

Ajouter ici une traditionnelle vue de campagne avec immenses prairies ponctuées de très grands arbres au feuillage fin et dense.

Il faudrait faire une étude.

C’est compliqué, c’est parfait, on ne s’endort pas.

Imaginer les bons travaux pour une vie idéale, trouver le bon compromis entre le neuf et le vieux, il y a des solutions, il faudrait faire une étude, chauffage au charbon ? type de vêtements ? rester habillé toujours pareil dans toutes les circonstances, habillé en tous les jours, pas de panoplie spécialisée, c’est une première garantie de suspension du temps.

Ajoutez ici le début d’un livre qui attaque bille en tête : un baron dans la force de l’âge, appelons-le Édouard, etc. affinités électives, fraîcheur, belle histoire d’amour d’été, capacité à prendre quelqu’un dans les bras de manière éperdue, vita nova, rouler dans les champs, courir la nuit, sensation d’être ici et maintenant, brûlure, quelque chose de direct, un bon début, c’est simple, expéditif, franc du collier, c’est rare, est-ce que les gens à l’époque parlaient vraiment comme ça ?

C’est dans les livres qu’on parle vraiment.

Il suffit de lire un livre qui s’écarte des manières du moment.

C’est rare.

Je fais un effort énorme de compréhension, je devrais mieux me documenter, travailler sur des bases solides, c’est trop tard, j’aurais dû commencer avant.

Je perds un temps fantastique, je ne devrais pas, c’est une erreur, j’écoute trop...

... c’est pas comme ça que j’irais vendre un scénario, le bon pitch, eh oui comme au base-ball, absolument, le pitch, vous avez 5 minutes pour raconter l’histoire.

... alors qu’on est déjà un grand cinéaste encore jeune, un vrai film sur du vrai réel...

Il faut se lancer, il y a une méthode : savoir exactement ce qu’on fait et uniquement ce qu’on est en train de faire avant de le faire, sans interface mentale, et ensuite le faire tout simplement.

J’ajoute que, dans une autre partie de ma vie, je me suis trompé complètement, j’avoue, je regrette, je croyais que collectionner des choses suffisait, comme on dispose des souvenirs corporels dans une vitrine...

Je regrette.

Je suis Robinson, c’est moi...

À une époque précédente, j’avais une vie très proche de la nature, par nécessité, installé dans une cabane faite main, après avoir réglé l’essentiel, j’aurais dû m’arrêter, j’ai continué comme un canard sans tête.

J’aurais dû prendre des vacances.

... beaucoup de travail pour pas grand-chose.

J’avais du temps à perdre.

Une série de projets à dormir debout.

Le sport, c’est mieux.

Elle m’a parlé.

Cheveux d’or.


Essayons de rassembler ces *** pour les enterrer, tout mettre en tas pour les annuler en vitesse, un résumé pour les détruire d’un coup, comme quand on revit en accéléré le film de sa vie juste avant de mourir.

Un millefeuille s’écrase dans mon cerveau.

On verra plus tard qu’il faudra faire l’équivalent avec les choses aimées, un monument qui grandira.

On s’en occupe à plein temps, on travaille, on ramène des tas de choses trouvées à l’extérieur, on les colle, il faudra acheter l’appartement du dessus et percer un trou dans le plafond pour continuer, ça augmente, musée sonore d’êtres aimés, catalogue de paroles dans l’air, c’est si loin qu’il faudrait un baobab.

Un monument au mort maison.

... je suis otage passé à l’ennemi, je suis conquis par les paroles des autres, ffft, je disparais, avalé, disparu, terminé, c’est problématique, tout devient affecté d’une puissance énorme, volonté de m’en sortir par de vraies lectures, crayon en main, d’auteurs importants, mon idéal de modification dans le bon sens de tout ce qui va se passer, mon algorithme de vie.

Je fais des études et ça ira mieux après, je suis un peu en perte de vitesse ces derniers temps, j’avoue, j’ai trop parlé ? vous trouvez que je me suis bizarrement comporté chez ces gens ? ils ont voulu me torturer, absolument, je peux le prouver, alors que je me suis mis en quatre toute ma vie.

Silence.

... il faut quand même qu’une reconnaissance soit possible...

Résumé.

Je suis enfermé dans un sale petit film concret, héros principal : le corps bouillant d’organes en décomposition.

... amis perdus, problèmes sous ciment, impossibilité retour immédiat, blocage en amour, difficulté recherche en général, frein et non-influence de bonnes choses et protection, manque elle.

Elle qui ?

Avec qui dois-je entrer en rapport ? qu’est-ce qui est bon pour moi ? qu’est-ce qui va se passer ? quel est le rapport de choses en moi qui va se mettre en rapport avec des choses elles-mêmes en rapports intenses et secrets ?

Je ne comprends pas tout, je devine, j’essaye.

Qui doit comprendre quoi ?

À la recherche de ?

Voilà ce que j’aurais pu faire si j’avais eu une formation, et un atelier assez grand pour construire mes essais taille réelle.

Je vais arranger tout ça, ça va bien se passer, les choses compliquées deviendront simples, je devrais construire un endroit approprié pour réfléchir à tout ça, je dois être aidé par le cadre, une table pratique, dépliante ? un toit, quelque chose de léger mais d’assez résistant quand même.

Au travail.

Finir par tout comprendre par analogie comme se révèle patiemment un ciel de puzzle.

Construire un meuble pour faire progresser ce travail, des heures penchées sur ces petits dessins noirs, un vrai bon petit Robinson qui fait au jour le jour le travail qu’il s’est fixé lui-même, une planche étroite bien poncée pour lire debout combinée à de petites étagères dessous, on y range des outils et les éléments essentiels pour bien accomplir la tâche fixée.

J’avance.

... il faudrait corriger à l’infini.

J’abandonne.

Bienvenue à la campagne.

Pommes dauphines surgelées.

Vue 360° sur la vallée.

Venez.

Bilan provisoire, il fait partout pareil, gris avec des gens dedans, post-campagne † in memoriam, ciel sale, réverbération maximum, comme si on avait installé une batterie de spots derrière une vitre opalescente de porte de clinique.

il faut faire exploser le passé dans le présent, oui, mais comment ? comment on sort ?

J’aurais dû être artiste.

Pause.

Il cherche un[e] assistant[e].





Il me faut un[e] spécialiste, on ne peut pas avoir toujours raison tout seul.


Comment s’en sortir ? sortir vers où et pourquoi ? quels sont les risques ? que faire ? pourquoi ? pour qui ? vers où ? avec quelle partie de qui relier les parties extérieures de moi ? rester seul ? combien de temps ? pourquoi ? quel intérêt ?

Et si j’arrêtais de parler tout seul, ça ne sert à rien, vous devriez vous laisser aller, pour changer, si j’arrêtais d’entendre des phrases…

Comment penser sans voix ?

Je progresse, sport de silence total, épouser ce qui se dit, technique camouflage, sage comme une image, pas un mot, on verra plus tard l’avantage de cette méthode.

Opération Perroquet Mort.

Une vie sans paroles avec juste des gestes, cure de signes, je me coule dans le mouvement des choses, je compose, je suis habile à présenter mon corps sous des rapports qui se composent directement avec les rapports qu’entretiennent les machines entre elles.

Vous devriez vous laisser aller, ils m’ont tous dit ça, pourquoi s’énerver comme ça ? vous êtes compliqué, vous n’êtes pas vivant, au sens nature, détendu, vous en faites trop, levant les yeux au ciel, alors que c’est le contraire, je ne suis pas assez compliqué pour être vivant, je suis un mécanisme pas assez artificiel pour ressembler à un vrai vivant.

Je ne le dis pas, c’est fini, maintenant Silence.
 






J’y suis, je suis déjà tout en haut, dans le vent, la terre est ronde, je suis un point saillant sur une surface courbe, me voilà sur l’extrême branche, ça va vite.


Bulles.




Je nage.
 

(O.C.)(O.K.)



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etc. etc.

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